Agroécologie

L'agroécologie est une approche transformatrice
qui renforce la résilience et l'adaptation au
changement climatique dans les
systèmes agricoles et alimentaires

La crise climatique et les menaces pour la sécurité alimentaire sont étroitement liées. Pour assurer la sécurité alimentaire pour tous, tout en préservant nos écosystèmes sans dépasser nos limites planétaires, l’agroécologie a pour objectif de transformer les systèmes agricoles et alimentaires dans le sens de la résilience et de l’adaptabilité climatiques.

Les modes actuels de production et de consommation entraînent une perte de ressources naturelles et détruisent les écosystèmes et les fonctions qu’ils assurent, ce qui rend les systèmes de production agricole plus vulnérables aux risques climatiques. Le changement climatique exacerbe cette situation et pousse les écosystèmes naturels dans leurs derniers retranchements, ce qui a d’importantes conséquences pour l’environnement, l’économie et l’humanité. Dans le même temps, les systèmes actuels de production alimentaire et d’utilisation des terres représentent de 21 à 37% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) et sont par conséquent l’un des principaux facteurs du changement climatique.

Pour essayer de faire en sorte que les systèmes de production alimentaire et d’utilisation des terres soient plus durables et résilients au climat, il faut adopter une approche transformationnelle pour garantir la survie de l’humanité. Dans son Rapport spécial sur le changement climatique et les terres émergées (Special Report on Climate Change and Land – SRCCL), le Groupe d’expert·e·s intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) déclare qu’on dispose de preuves solides et qu’il y a consensus sur le fait qu’accroître la résilience du système alimentaire grâce à l’agroécologie et à la diversification est un moyen efficace d’assurer l’adaptation au changement climatique (ACC). Les mesures d’adaptation basées sur l’agroécologie supposent un renforcement de l’agrobiodiversité, une amélioration des processus écologiques et l’existence de services écosystémiques. Elles visent également à renforcer les communautés locales et reconnaissent le rôle et la valeur des connaissances autochtones et locales.

L’agroécologie fournit le raisonnement systémique nécessaire et favorise des mesures d’adaptation globales qui évoluent dans le temps. Elle vise à élaborer des systèmes d’alimentation et d’utilisation des terres durables et encourage les stratégies et pratiques résilientes au climat et à faibles niveaux d’émissions.

Table agroécologie et changement climatique

En signant l’Accord de Paris en 2015, 196 États membres de l’Organisation des Nations unies ont accepté de réformer leurs programmes de développement afin de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 ou 2°C tout en assurant la production alimentaire grâce à des mesures d’adaptation au changement climatique et d’atténuation de ses effets. Dans le cadre des Contributions déterminées au niveau national (CDN), chaque nation s’engage à appliquer des mesures visant à réduire ses émissions nationales de gaz à effet de serre et à s’adapter aux effets du changement climatique.

L’agroécologie est présentée comme une approche holistique de protection contre le changement climatique qui offre toute une gamme de co-bénéfices potentiels. Plusieurs pays tiennent spécifiquement compte de l’agroécologie dans leurs CDN. Leippert et al. (2020) ont analysé·e les CDN de 135 États membres de la CCNUCC pour déterminer leur intégration de l’agroécologie. Résultats : 12,5% d’entre eux (17 pays) indiquent explicitement que l’agroécologie fait partie de leur stratégie. Par ailleurs, dans d’autres processus liés à la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC), l’agroécologie est fortement soutenue. Par exemple, le Rapport spécial 2019 sur les terres émergées du Groupe d’expert·e·s intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et le rapport 2019 du Groupe d’expert·e·s de haut niveau du Comité de la sécurité alimentaire soulignent le potentiel de l’agroécologie pour l’adaptation.

L’agroécologie est considérée comme une discipline scientifique, un ensemble de pratiques agricoles et un mouvement social. Pour l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’agroécologie est une approche dynamique et interdisciplinaire des systèmes agroalimentaires qui inclut toutes les étapes, de la production à la consommation. Elle tient compte de toutes les dimensions environnementales, socioculturelles, technologiques, scientifiques et politiques des systèmes agroalimentaires et encourage explicitement leur transformation dans le sens de la durabilité et la résilience.   

L’agroécologie s’appuie sur 13 principes qui sont les éléments fondamentaux de sa mise en œuvre. La transformation agroécologique d’un système alimentaire s’effectue sur cinq niveaux interdépendants. La figure ci-dessous illustre les interdépendances entre les principes, les niveaux de transformation et les niveaux d’intégration.

Cadre de l'agroécologie

Figure 1 : Niveaux d’intégration, niveaux de transformation et principes : Cadre analytique de l’approche holistique de l’agroécologie. (Source: GIZ)

L’agroécologie offre une occasion de promouvoir les questions d’ACC dans la communauté agricole et au-delà.

Parce qu’elle est centrée sur l’être humain, l’agroécologie reconnaît que la crise de la sécurité alimentaire est étroitement liée à la crise climatique. On ne peut pas trouver de solution pour l’une sans tenir compte de l’autre. Ce problème nécessite une approche systémique qui inclut différents éléments de notre système complexe d’interaction entre la nature et l’humain et qui tient compte de différentes échelles spatiales et disciplinaires. L’approche agroécologique s’appuie sur la conscience que les systèmes alimentaires sont caractérisés par un niveau élevé de complexité et elle s’efforce par conséquent de créer un milieu favorable à l’adoption de meilleures pratiques en s’appuyant sur la politique et la recherche.

L’agroécologie offre la possibilité d’intégrer les questions de climat dans le secteur de l’alimentation et de l’agriculture au niveau de la pratique et de la recherche et dans le domaine de la politique. Ces derniers temps, dans le contexte de l’ACC, l’agriculture a joué un rôle peu important au niveau de la politique générale. L’agroécologie peut combler ce déficit et offrir de nouvelles opportunités dans ce domaine. Nombreuses solutions efficaces sont déjà mises en œuvre. Pour en savoir plus, consultez ces exemples de réussite.

Selon les 13 principes de l’agroécologie (voir Quelle théorie sous-tend l’agroécologie ?), il existe différents points d’entrée à l’ACC.

Les principes de recyclage, de réduction des intrants, de santé du sol, de biodiversité et de diversification économique offrent des points d’entrée à l’adaptation au changement climatique d’un point de vue agroécosystémique. En appliquant ces principes, les communautés rurales peuvent réduire les risques de perte de revenu liés aux mauvaises récoltes d’origine climatique. La diversification des agroécosystèmes, p. ex. grâce à l’introduction de méthodes agrosylvopastorales et de pratiques de gestion agricole telles que les cultures associées, le cycle des nutriments et le labour de conservation du sol, accroît la résilience à la sécheresse en améliorant la rétention d’eau et les microclimats. Au-delà de l’adaptation, l’accroissement de la séquestration du carbone dans le sol et la réduction du recours aux combustibles fossiles contribuent à atténuer le changement climatique.

L’agroécologie ne concerne pas seulement des risques climatiques particuliers. Elle améliore la fourniture de services écosystémiques et, pour finir, entraîne une résilience accrue des systèmes agricoles et des moyens d’existence au changement climatique.

L’intégration des systèmes permet d’accroître les co-bénéfices de l’agroécologie pour l’ACC. Grâce à l’intégration de l’agroécologie à l’échelle du paysage et du système alimentaire, on peut obtenir des paysages et des moyens d’existence plus résilients.

Au niveau communautaire ou sociétal, des principes tels que la cocréation de connaissances, les valeurs sociales et l’alimentation, l’équité, la connectivité, la gouvernance foncière et celle des ressources naturelles, ainsi que la participation, servent de points d’entrée à une amélioration de l’adaptation au changement climatique pour les communautés rurales et urbaines. La participation et les liens entre les parties prenantes peuvent servir un type de gouvernance des terres et des ressources naturelles en adéquation avec les conditions locales et flexible face à un environnement fluctuant. L’intégration de différents types de connaissances entraîne des innovations technologiques et sociales localement adaptées et pertinentes, qui renforcent les moyens d’existence dans leur adaptabilité et leur résilience au changement climatique.  

Toutefois, l’agroécologie ne tient pas encore compte des données sur le changement climatique prévu et produit par conséquent des avantages climatiques non prévus. Néanmoins, en suivant les 13 principes de l’agroécologie, l’ACC peut être intégrée à quatre niveaux différents : celui du champ, celui de l’exploitation et des moyens de subsistance, celui du paysage ou de la communauté, et celui du système alimentaire (voir Figure 2). Pour obtenir des avantages plus importants, un accroissement des investissements publics et privés, l’application de politiques adaptées de subventionnement de la production agroécologique, ainsi qu’une collaboration plus étroite entre les responsables des orientations politiques et les chercheur·e·s, sont primordiaux.

Framework Agroecological Adaptation

Figure 2 : Cadre de compréhension de l’adaptation agroécologique au changement climatique à différents niveaux, montrant également comment elle est influencée par la gouvernance des secteurs public et privé (Source: Sinclair et al. 2019).

En résumé, des preuves solides montrent que l’agroécologie accroît la résilience, notamment en renforçant a) les principes écologiques, en particulier la biodiversité, la diversité générale et les sols sains ; et b) les aspects sociaux, en particulier la cocréation et le partage des connaissances, ainsi que l’ancrage des traditions. L’agroécologie étant étroitement liée à l’adaptation fondée sur les écosystèmes (AfE, ecosystem-based adaptation – EbA), cette dernière peut servir de lien entre les communautés agricoles et climatiques. D’une part, on pourrait considérer que l’agroécologie fait partie du concept, plus vaste, de l’AfE, mais en mettant l’accent sur les secteurs agricoles et alimentaires ou sur les paysages cultivés. D’autre part, on pourrait dire que l’agroécologie applique l’AfE aux trois premiers niveaux de transformation (voir Figure 1) mais va au-delà de « l’utilisation de la biodiversité et des services écosystémiques dans le cadre d’une stratégie d’adaptation générale » en tenant également compte de la sphère politique et sociétale.

Publications

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